Bienvenue sur le site de la Tribune & des futurs Etats généraux du mécénat et de l'engagement sociétal de l'entreprise

Vous trouverez ici le texte de la tribune parue dans Le Figaro du 15 novembre 2022, que nous vous invitons à rejoindre, et bientôt les informations sur les Etats-Généraux du mécénat et de l’engagement sociétal de l’entreprise que nous proposons d’organiser.
Si vous souhaitez contribuer à la suite, n’hésitez pas à nous transmettre un message en cliquant ici.
Merci !

Repenser le mécénat de l’entreprise

Depuis le début du XXIe siècle, il existe une asymétrie entre la prospérité grandissante des grandes entreprises privées et l’ampleur des enjeux collectifs qui nécessitent des ressources croissantes pour être financés.

La prise de position inédite du Secrétaire Général des Nations Unies pour que les grands acteurs de l’énergie transfèrent un peu de leur rente actuelle aux populations, est plus qu’un signe ; c’est un appel à passer du mécénat respectable « à la Bill Gates », périphérique à l’activité de l’entreprise, à un partage de la valeur créée par l’entreprise qui soit institutionnalisé, mieux négocié et légitimé.

Le mécénat est la contribution sociétale de l’entreprise qui bénéficie du régime fiscal le plus incitatif à peu près partout dans le monde occidental. Il y a une raison idéologique à ce choix : c’est l’acceptation générale de l’économie de marché qui débouche sur un contrat implicite de « solidarité de destin » entre l’entreprise et la société civile.
En France, le mécénat ouvre droit jusqu’à 60% de remboursement public : plus encore que le crédit impôt recherche, la baisse des charges sur l’emploi des salariés peu qualifiés, ou la lutte contre le changement climatique. Le dialogue de fond conduit par l’Admical, a débouché sur les lois Léotard et Aillagon qui ont permis ce « deal ». Est-il toujours justifié vingt ans plus tard, alors que le rapport entre l’entreprise et la société est devenu radicalement différent ?

Trois facteurs nouveaux au moins appellent à dépasser un cadre devenu beaucoup trop rigide.

Premièrement, les revenus des grandes entreprises sont sans commune mesure avec ce qu’ils étaient à la fin des Trente Glorieuses ou durant les années 90. Leur engagement progresse : le baromètre du mécénat d’entreprises de France Générosités 2021 fait état de 3,5 milliards d’euros, soit + 119% depuis 2010. Elles sont en mesure de s’engager de manière plus déterminée encore, alors qu’elles bénéficient en termes d’images de leur extraversion sociale (raison d’être, politique d’engagement, impact social…), et d’un contexte mondial qui prévoit la baisse de l’impôt sur les sociétés de 20 à 15% comme discuté à l’OCDE.

Deuxièmement, le cadre juridique actuel qui repose sur des incitations fiscales plafonnées à des montants de mécénat, limite de facto l’engagement des entreprises. Pourtant l’entreprise, qui en a de plus en plus les moyens, peut et doit s’investir sincèrement et sans réserve, pour dynamiser un territoire ou défendre une juste cause. Les stratégies sociétales ne doivent plus dépendre ni s’inscrire dans ce cadre limitant et in fine contre-productif.

Troisièmement, une communauté nouvelle d’acteurs publics et privés s’illustre dans l’innovation sociale et environnementale : laboratoires, entreprises sociales, coalitions d’acteurs engagés sans cadre juridique formel, innovent et construisent ensemble des réponses aux besoins des territoires, indépendamment de tout bénéfice fiscal.

 

Après des années d’atermoiements, dus à la crainte des donateurs comme des bénéficiaires de voir les dispositions fiscales diminuer ou même disparaître, il devient opportun de réunir toutes les parties prenantes, pour remettre à plat leurs « logiciels de pensée » sur le mécénat comme sur l’engagement sociétal des entreprises.

Plus la richesse créée par l’entreprise est disponible, plus il faut lui permettre de l’allouer à l’amélioration de la gestion du bien commun, au regard de la nécessité de construire un monde plus juste et plus durable.

 

L’enjeu est de passer d’un mécénat marginal par rapport au business de l’entreprise, à une politique de répartition de la valeur créée entre les différentes parties prenantes légitimes, pensée à long-terme et discutée ouvertement avec elles. 

Cette nouvelle forme de mécénat serait la véritable clef de voûte de l’action des entreprises et serait un prolongement des stratégies élaborées pour renforcer la durabilité de leurs modèles économiques.

Quelles libéralités les entreprises peuvent-elles obtenir pour s’engager plus largement ? Quel cadre de droit entrepreneurial « non-profit » pour gérer cet engagement « en société » ? Quelles nouvelles règles de partage de la valeur promouvoir entre les différentes parties prenantes, au-delà des actionnaires ?  Quel impact rechercher et comment l’évaluer de façon fiable, robuste et transparente ?

Plusieurs pistes sont à approfondir et à formaliser à l’occasion de futurs Etats-Généraux du mécénat et de l’engagement sociétal de l’entreprise, que nous proposons de tenir rapidement. 

 

Les premiers signataires :

Patrick d’Humières, co-fondateur de l’Admical, expert RSE, auteur de « la nouvelle pensée européenne » (L’Aube)

Gilles Vanderpooten, directeur général d’ONG, auteur de « La France des solutions » (Arthaud)

Thierry Sibieude, professeur, fondateur de la chaire Entrepreneuriat et Innovation Sociale de l’ESSEC

Pierre-Edouard Stérin, entrepreneur, investisseur, fondateur du Fonds du Bien Commun

 

Repenser le mécénat d’entreprise